ILS LAISSENT TOUJOURS LES PORTES OUVERTES

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ILS LAISSENT TOUJOURS LES PORTES OUVERTES

ILS LAISSENT TOUJOURS
LES PORTES OUVERTES


Création 2003

Texte et scénographie
Natalie Artois et Michel Mathieu

Public, adultes
Durée 1h30

Distribution

Michel Mathieu
Natalie Artois

Lumières
Mourad Maalaoui

Paysage sonore
Hdelay

 

A propos du spectacle

Au com­men­ce­ment il y eu un texte de Bataille…
Qu’on ne dira pas !
Il nous pro­vo­quera.
Nos explo­ra­tions ont enfin cris­tal­lisé un bizarre édifice à onze portes d’entrées : un laby­rin­the amou­reux.
S’y croi­sent et décroi­sent, au pouls d’Eros ou de ses démons, les fils inti­mes de la mémoire et les fibres char­nel­les de nos mythes sou­ter­rains. Ni tra­gé­die, ni danse, ni quo­ti­dien, une tra­ver­sée plutôt… comme la vie elle-même dans ses formes et dans ses états.
Un mys­tère à deux avec un dieu absent, caché ou à inven­ter.

Souscrivant à la pensée de Léopardi – on n’a de vrai que ses illu­sions – nous éprouvons que le réel n’est rien si l’on ne s’en empare . Une ten­dance majeure, pour ne pas dire majo­ri­taire, de l’art d’aujourd’hui décline le degré zéro de la réa­lité. Soit pour en faire le procès, dénon­cia­tion sati­ri­que et sou­vent ambigüe, soit pour nous amener dans l’orbe angois­sant de son vide et nous la faire éprouver. Le corps, le sexe, est le lieu pri­vi­lé­gié de ce dévoi­le­ment – au sens propre comme au figuré – requis à tra­vers son expo­si­tion obs­cène voire por­no­gra­phi­que, l’intel­li­gence en plus, en embus­cade. De Rodrigo Garcia à Yan Fabre pour parler théâ­tre…Mais cette direc­tion sub­merge les formes bien au-delà pour dire et redire : « ce n’était donc que ça ! »

Nous sommes ailleurs, dans un par­cours qui ne s’arrête pas à ce vide, même s’il le frôle par­fois .

L’énigme posée à Eros lève des répon­ses qui sont autant de che­mins vers un réen­chan­te­ment où la fas­ci­na­tion du désir, le tour­ment de la perte, la jouis­sance de l’étreinte comme la pré­mo­ni­tion de la mort en son sein même, relan­cent à tout ins­tant les dés du combat amou­reux.

Car lutte il y a, celle des deux pro­ta­go­nis­tes sur le pla­teau, et celle, retrou­vée à tra­vers les expé­di­tions qu’ils ont chacun et cha­cune, menées eux-mêmes en leurs mémoi­res pour en extraire ce que l’intime pou­vait avoir de par­ta­gea­ble. Mais ce fai­sant ils croi­sent au hasard des gestes ou des paro­les extrai­tes des thèmes et des figu­res com­mu­nes : d’Aphrodite à Salomé, de Gaïa à Chronos, les­quel­les vont se mêler aux per­son­na­ges et aux situa­tions de notre quo­ti­dien le plus ordi­naire ; mère en maison de retraite, fugue en stop de la fille, homme pressé de se rebou­ton­ner après l’amour …

Tout cela se cons­truit comme un rêve, rêve de chair s’élaborant non pas sim­ple­ment sur les gestes du duo , mais leurs croi­se­ments avec des cou­leurs , le rouge d’un tissu à pas­sions, des matiè­res trans­fi­gu­rées, terre, farine ou sang, des objets à méta­mor­pho­ses, table, portes ou corde pour dire le temps, le pas­sage, la clô­ture…

Ainsi le voyage que trace cette fugue à deux, modu­lée par les sons immé­mo­riaux de H.Delay, est-il aussi façon de dire les noces avec le monde, déli­ran­tes ou dou­lou­reu­ses, sans rien refu­ser, par l’épreuve concrète des sens, le corps à corps phy­si­que avec tout ce qui nous entoure, la ten­ta­tive de sur­mon­ter une fois pour toutes le face à face entre l’objec­tif ( le pla­teau et ses « meu­bles » ) et le sub­jec­tif (le par­cours inté­rieur de l’acteur ). Le lan­gage qui naît de cette ten­sion se veut ouver­ture poé­ti­que au sens pre­mier, inci­ta­tion pour le spec­ta­teur à se faire sa propre his­toire, à réin­ven­ter à tra­vers cette vision des méta­mor­pho­ses amou­reu­ses sa rela­tion sin­gu­lière à un monde qui se refuse là à n’être plus que le désert d’un temps d’insi­gni­fiance.

Un décor fait d’une série de portes déboî­tées, posées en équilibre ins­ta­ble contre les cloi­sons du théâ­tre, dans un camaïeu de gris, une table cubi­que, des papiers déchi­rés, des bouts de tissus… cave ou gre­nier pour un voyage, pour le vent…

L’objet prend ici tour à tour divers sens au-delà de sa propre réa­lité. Une corde pourra deve­nir aussi bien la ligne de vie, une porte, le lieu de la méta­mor­phose, une table un autel, un billot, une prison ou un cer­cueuil. Les volu­mes com­po­sent l’espace à la demande du jeu.

Tout se fait et se défait à vue, même si le tra­vail de lumière est impor­tant pour appuyer la dif­fé­ren­cia­tion des plans.

Il est apparu que ce péri­ple à tra­vers des états, des modes de jeu et des situa­tions contrai­res, pas­sant du réel à l’oni­ri­que ou au mythi­que, de la parole ordi­naire au poème ou au chant – le même écart tra­ver­sant la ges­tua­lité – deman­dait, pour accom­pa­gner dans ces décro­cha­ges l’esprit du spec­ta­teur, un fil d’Ariane, ou plutôt un mes­sa­ger ; ce rôle a été dévolu au son.

Les pay­sa­ges sono­res de Hdelay jouent ce rôle, tantôt réson­nant dans l’action, tantôt annon­çant les muta­tions en deve­nir.

En somme com­ment défi­nir ce type de spec­ta­cle ? Le geste y est impor­tant, ceci n’appar­tient pour­tant pas à la danse ni à la danse-théâ­tre.

Certains pas­sa­ges font réfé­rence à des mythes, il ne s’agit pas non plus d’une tra­gé­die.

Parfois l’action est pro­saï­que, on est pour­tant à cent lieues du théâ­tre du quo­ti­dien.

Ce serait peut-être une sorte de poème dra­ma­ti­que, une tra­ver­sée, comme la vie elle-même, diverse dans ses formes comme dans ses états. Un « mys­tère » à deux, au sens médié­val du terme, avec un dieu absent, caché ou à inven­ter.